Alors que la plupart des grandes activités sportives versent dans le libéralisme, le rugby français n'est pas encore vraiment prêt à s'y vautrer. Cela dit, au train où sortent les affaires, il n'en sera bientôt pas loin. Bien sûr, tout s'achète, et l'activité de chaque être à son prix : pour Neymar, ce sera 220 millions d'euros made in Qatar. Laporte, lui, se contentait des 150.000 euros d'un homme du bâtiment. Concernant Mbappé, allons-y pour 180 millions, mais attention, hein, sous forme de prêt... Parce que c'est vraiment plus pratique pour contourner le fair-play financier, cet oxymore footballistique.
On le sait depuis qu'il a monté des affaires avec les membres du staff du XV de France quand il l'entraînait, Bernard Laporte était prêt à actionner pour accéder au pouvoir fédéral, puis une fois roi de Marcoussis se maintenir sur le trône. Comme un président de Fédérale 3 plongeant son vote dans l'urne en décembre dernier, puis aménageant son club-house pour y installer un écran plat HD avec décodeur intégré, il fallait être naïf pour imaginer le contraire. C'était juste une affaire de temps. Neuf mois. Et voilà le bébé.
Altrad qui veut tout acheter, des Springboks, de la notoriété, de la légitimité, le maillot du XV de France et que sais-je encore, avait compris qu'il pouvait se faire prêter un ouvreur - sud-africain de préférence - pour terminer la saison dernière ; mais il n'a pas pensé, lui l'homme pourtant d'affaires, à consentir un prêt à Laporte, président bénévole dans le besoin. C'était pourtant la solution, plutôt que de le rémunérer à causer jambon et œufs fêlés face des cadres encravatés. Au passage, on notera que le mensonge fait partie des échafaudages altradiens dès lors qu'il s'agit de servir sa cause. Il faut dire que d'autres avant lui, citons juste Lorenzetti, Savare et Bouscatel, ça va leur faire plaisir, lui avaient montré la voie.
Le lien dangereux entre Altrad et Laporte existe. Pour preuves les dénégations maladroites de l'un balayées récemment par le renoncement de l'autre à ses émoluments. Qu'on se le dise, le reste n'est que mensonges des journalistes, tonne Laporte, et vous êtes priés d'y croire, sinon vous serez privés de télé. J'attends néanmoins de voir comment Altrad sortira de cette tempête médiatique dans laquelle il s'est plongé tout seul, Narcisse regardant de trop près son reflet dans le marigot. Parce que si Bernie le Dingue bénéficie d'un petit crédit, Mohed Altrad a déjà ravi à Mourad Boudjellal le titre de président le plus décrié du Top 14. Et c'était loin d'être gagné, n'est-ce pas Leigh ?
Ca ne vous aura pas échappé, quand la convention FFR/LNR a été signée pour donner entre autres dix semaines de repos-préparation aux internationaux dont le nombre permet de constituer trois équipes de France, Louis Picamoles, qui était bien calé en Angleterre, est rentré illico au bercail. Chez qui ? Chez Mohed. Un prêt ? Non, un rachat. Alors qu'on sait maintenant qu'un prêt, c'est plus sympa, plus léger, ça n'entre pas dans le salary cap, c'est indolore et on peut étaler les versements sur deux, trois ou quatre ans. Déjà experts dans l'art de détourner le plafond, certains présidents ne vont pas se gêner pour suivre l'exemple du PSG et de ses princes de l'usine à gaz pour se refiler des joueurs comme de vulgaires prêteurs sur gages.
Parce qu'ils sont prêts, les recrutés ! Aaron Cruden s'est illustré d'entrée, Cheslin Kolbe, Chris Ashton et Fa' asiu Fuatuai aussi. D'autres vont briller dans la suivante. Pendant ce temps, quarante-cinq internationaux n'y étaient pas, ou alors remplaçants, et pas vraiment concernés par le Championnat, eux qui sortaient la veille de tests physiques et physiologiques à Marcoussis. Pas terribles, ces tests, d'ailleurs, si j'en crois un copain qui assistait à la remise des diplômes. Quelques joueurs ont profité de l'été pour bien bosser seuls dans leur coin, mais ils sont loin d'être une majorité. Inquiétant à deux mois du premier rendez-vous face aux All Blacks.
Car le bonheur était dans le pré de Dunedin, samedi dernier. Putaing de feu d'artifice comme on en voit un tous les deux ans entre deux équipes composées de techniciens de grande surface. Je sais, on écrit Rugby Championship, mais c'est aussi naze que World Rugby pour rebaptiser l'International Rugby Board, alors je reste sur Four Nations et c'est tout. On regrettera donc que ce week-end, le Four Nations fasse relâche tant on a pris l'habitude, depuis deux semaines, d'apprécier un jeu sans artifices comme on (re)prend la route de l'été vers le sud.
mercredi 30 août 2017
jeudi 17 août 2017
Tourner l'étable
A l'époque d'Albert Ferrasse, c'est à dire de 1966 à 1991 tout de même, le rugby français était dirigé d'Agen plutôt que de Paris. On disait "Agen même" pour différencier l'épicentre de Boé, Bon-Encontre ou Le Passage d'Agen qui recueillaient du coup quelques éclats de notoriété. C'est à Agen que naissaient les formules de championnat - dont celle à quatre-vingt-clubs, idée particulièrement populiste de Jacques Fouroux pour élargir l'élite et donc la base électorale - et s'adaptait le règlement des mutations - on ne disait pas transfert, laissé au football.
Une de ces règles, particulièrement claire, comportait trois volets : un joueur sollicité par Agen ne peut pas refuser cette offre ; quiconque veut partir d'Agen ne pourra plus jouer en Première Division jusqu'à nouvel ordre voire en équipe de France ; le joueur muté dans un club dont le président n'est pas un ami des dirigeants d'Agen sera interdit d'élite. On exagère à peine... Les autres alinéas pouvaient bouger au fil des saisons, ces trois commandements, eux, restèrent longtemps gravés dans le marbre.
Dans la préfecture du Lot-et-Garonne se rassemblait régulièrement le XV de France, c'est d'Agen où se construisaient ou se défaisaient les compositions d'équipes nationales et les staffs, tout cela sans oublier que le président de la commission de sélection, Guy Basquet, était d'Agen même. Tout cela était parfaitement compris de tous - on y inclura les journalistes - et celui qui sortait du cadre savait à quoi il s'exposait.
Quand Jacques Fouroux, fils putatif d'Albert 1er, décida de tuer le père pour prendre à son tour le pouvoir en 1990 après avoir été le sélectionneur-entraîneur-manager tout puissant du XV de France pendant dix ans, il se fit découper en morceaux avant de migrer vers le XIII. Et qui hérita du trône un an plus tard ? Bernard Lapasset, dont le père était un ami d'Albert, l'épouse agenaise et lui-même deuxième-ligne des juniors du SUA.
Pourquoi s'étonner du peu d'éthique du nouveau président de la FFR puisqu'il s'agit toujours, dans la saga ovale, de ne jamais s'éloigner des fondamentaux. On trouvera que l'origine du terme "éthique" remonte à la guerre de Troie, sa racine (éthos) signifiant "étable". Là où, après en être sorti le matin revient toujours le soir le bétail, bœufs, vaches, moutons, chèvres et ânes. L'éthique, ce serait donc le retour ; métaphoriquement, en soi-même.
Filons donc la métaphore : de la Cité d'Antin au CNR de Marcoussis, les pratiques restent à l'identique. Les têtes changent mais les mœurs sont stabilisées. Du latin "stabulum", étable encore. La coutume veut que les puissants se servent plutôt que de servir. Après chaque montée de bonnes intentions suit un retour à la normale, ce point de départ qui consiste à profiter des leviers qu'offre le pouvoir. On parlerait d'homéostasie, docteur.
Tout est circulaire, imaginaient les Anciens. De forme oblongue, pour ce qui nous distingue. De Ferrasse à Laporte, les présidents et leurs séides ont toujours trouvé leur brassée - plus ou moins grosse - de foin. Je vous l'accorde, aujourd'hui c'est un peu plus compliqué dans la mesure où Bernie le Dingue a fait de Mohed Altrad son obligé, à moins que ce ne soit l'inverse. Les deux personnages s'acoquinent dans leur désir de dominer : l'un dispose de l'argent, l'autre des clés du système et des codes qui vont avec. Cela permettra-t-il à Montpellier de devenir le cœur du rugby français ?
Il faut que tout change pour que rien ne change. Telle était notre conclusion, sur Côté Ouvert, au temps des dernières élections, reprenant la fameuse antienne lampédusienne. Pas de surprise donc à l'heure du retour aux affaires. Pas même de lassitude ni d'affliction ou de résignation tellement ces avatars étaient prévisibles. Heureusement, en amont des écuries d'Augias demeure le rugby, celui du ballon et du terrain, et de poignées d'hommes et de femmes autour.
Coupe du monde féminines, puis Four Nations Championship, ProD2 et bientôt Top 14: dans le vestiaire se serrent les habits. Chacun se dépouille des siens, ce qui reste la meilleure façon de se retrouver. J'ai toujours pensé que cette mise à nu était un endroit de vérité. Avant de se constituer en équipe, ceux qui s'y retrouvent descendent en eux-mêmes, et personne ne peut le faire à leur place. Question d'éthique personnelle, et c'est un pléonasme.
C'est ainsi, certainement, que le Stade Rochelais, est parvenu à se hisser en demi-finale la saison passée. Je regrette seulement qu'aujourd'hui, en regardant la feuille des transferts (j'y succombe moi aussi), une douzaine d'Espoirs ne trouvent pas leurs places à Marcel-Deflandre. Ils ont entre 17 et 22 ans, se nomment Vaslin, Benjamin, Poences, Pili, Picquette, Destruels, Francoz, Bendjaballah, Dubié, Fuertes, Dubois, Luteau et Gerbaud, et partent vers Dijon, Brive, Nantes, Vannes, Angoulême, Paris, Oyonnax, Agen, Niort et Castres quand débarquent au port les All Blacks René Ranger et Tawera Kerr-Barlow.
Ironie du destin pour un club qui refusa en 1977 la venue du capitaine néo-zélandais Graham Mourie pour privilégier ses enfants. L'un d'entre eux se nommait "Bébert" Dieu, troisième-ligne aile champion de France juniors sous la férule de mon parrain Jacky Adole avec une génération mise ainsi en confiance et qui allait terrasser ensuite coup sur coup les clubs cadors de l'époque, Brive, Agen, Béziers. Mais j'imagine que ces jeunes talentueux cherchent du temps de jeu pour revenir plus forts ensuite.
Ce choix de nourrir des pousses, c'est celui de l'AS Béziers en Pro D2 qui mise sur une poignée de gamins. La ProD2, c'est aussi Narbonne et j'aime le choix de son coach, Christian Labit, de laisser tomber les ordinateurs, les GPS et le toutim informatique d'accompagnement à l'entraînement pour privilégier la piste du houblon. "Boire deux ou trois bières ensemble, c'est apprendre à se connaître. Ca ne fait pas gagner des matches, mais ça ne les fait pas perdre non plus..." C'est donc avec ce tirage que j'ouvre le club-house de Côté Ouvert, saison 2.
Une de ces règles, particulièrement claire, comportait trois volets : un joueur sollicité par Agen ne peut pas refuser cette offre ; quiconque veut partir d'Agen ne pourra plus jouer en Première Division jusqu'à nouvel ordre voire en équipe de France ; le joueur muté dans un club dont le président n'est pas un ami des dirigeants d'Agen sera interdit d'élite. On exagère à peine... Les autres alinéas pouvaient bouger au fil des saisons, ces trois commandements, eux, restèrent longtemps gravés dans le marbre.
Dans la préfecture du Lot-et-Garonne se rassemblait régulièrement le XV de France, c'est d'Agen où se construisaient ou se défaisaient les compositions d'équipes nationales et les staffs, tout cela sans oublier que le président de la commission de sélection, Guy Basquet, était d'Agen même. Tout cela était parfaitement compris de tous - on y inclura les journalistes - et celui qui sortait du cadre savait à quoi il s'exposait.
Quand Jacques Fouroux, fils putatif d'Albert 1er, décida de tuer le père pour prendre à son tour le pouvoir en 1990 après avoir été le sélectionneur-entraîneur-manager tout puissant du XV de France pendant dix ans, il se fit découper en morceaux avant de migrer vers le XIII. Et qui hérita du trône un an plus tard ? Bernard Lapasset, dont le père était un ami d'Albert, l'épouse agenaise et lui-même deuxième-ligne des juniors du SUA.
Pourquoi s'étonner du peu d'éthique du nouveau président de la FFR puisqu'il s'agit toujours, dans la saga ovale, de ne jamais s'éloigner des fondamentaux. On trouvera que l'origine du terme "éthique" remonte à la guerre de Troie, sa racine (éthos) signifiant "étable". Là où, après en être sorti le matin revient toujours le soir le bétail, bœufs, vaches, moutons, chèvres et ânes. L'éthique, ce serait donc le retour ; métaphoriquement, en soi-même.
Filons donc la métaphore : de la Cité d'Antin au CNR de Marcoussis, les pratiques restent à l'identique. Les têtes changent mais les mœurs sont stabilisées. Du latin "stabulum", étable encore. La coutume veut que les puissants se servent plutôt que de servir. Après chaque montée de bonnes intentions suit un retour à la normale, ce point de départ qui consiste à profiter des leviers qu'offre le pouvoir. On parlerait d'homéostasie, docteur.
Tout est circulaire, imaginaient les Anciens. De forme oblongue, pour ce qui nous distingue. De Ferrasse à Laporte, les présidents et leurs séides ont toujours trouvé leur brassée - plus ou moins grosse - de foin. Je vous l'accorde, aujourd'hui c'est un peu plus compliqué dans la mesure où Bernie le Dingue a fait de Mohed Altrad son obligé, à moins que ce ne soit l'inverse. Les deux personnages s'acoquinent dans leur désir de dominer : l'un dispose de l'argent, l'autre des clés du système et des codes qui vont avec. Cela permettra-t-il à Montpellier de devenir le cœur du rugby français ?
Il faut que tout change pour que rien ne change. Telle était notre conclusion, sur Côté Ouvert, au temps des dernières élections, reprenant la fameuse antienne lampédusienne. Pas de surprise donc à l'heure du retour aux affaires. Pas même de lassitude ni d'affliction ou de résignation tellement ces avatars étaient prévisibles. Heureusement, en amont des écuries d'Augias demeure le rugby, celui du ballon et du terrain, et de poignées d'hommes et de femmes autour.
Coupe du monde féminines, puis Four Nations Championship, ProD2 et bientôt Top 14: dans le vestiaire se serrent les habits. Chacun se dépouille des siens, ce qui reste la meilleure façon de se retrouver. J'ai toujours pensé que cette mise à nu était un endroit de vérité. Avant de se constituer en équipe, ceux qui s'y retrouvent descendent en eux-mêmes, et personne ne peut le faire à leur place. Question d'éthique personnelle, et c'est un pléonasme.
C'est ainsi, certainement, que le Stade Rochelais, est parvenu à se hisser en demi-finale la saison passée. Je regrette seulement qu'aujourd'hui, en regardant la feuille des transferts (j'y succombe moi aussi), une douzaine d'Espoirs ne trouvent pas leurs places à Marcel-Deflandre. Ils ont entre 17 et 22 ans, se nomment Vaslin, Benjamin, Poences, Pili, Picquette, Destruels, Francoz, Bendjaballah, Dubié, Fuertes, Dubois, Luteau et Gerbaud, et partent vers Dijon, Brive, Nantes, Vannes, Angoulême, Paris, Oyonnax, Agen, Niort et Castres quand débarquent au port les All Blacks René Ranger et Tawera Kerr-Barlow.
Ironie du destin pour un club qui refusa en 1977 la venue du capitaine néo-zélandais Graham Mourie pour privilégier ses enfants. L'un d'entre eux se nommait "Bébert" Dieu, troisième-ligne aile champion de France juniors sous la férule de mon parrain Jacky Adole avec une génération mise ainsi en confiance et qui allait terrasser ensuite coup sur coup les clubs cadors de l'époque, Brive, Agen, Béziers. Mais j'imagine que ces jeunes talentueux cherchent du temps de jeu pour revenir plus forts ensuite.
Ce choix de nourrir des pousses, c'est celui de l'AS Béziers en Pro D2 qui mise sur une poignée de gamins. La ProD2, c'est aussi Narbonne et j'aime le choix de son coach, Christian Labit, de laisser tomber les ordinateurs, les GPS et le toutim informatique d'accompagnement à l'entraînement pour privilégier la piste du houblon. "Boire deux ou trois bières ensemble, c'est apprendre à se connaître. Ca ne fait pas gagner des matches, mais ça ne les fait pas perdre non plus..." C'est donc avec ce tirage que j'ouvre le club-house de Côté Ouvert, saison 2.
mercredi 9 août 2017
De pierres et de mots
"Il
suffit parfois de quelques pierres, d'un simple muret fabriqué par l'homme ;
des pierres aux teintes chaudes - jaune, ocre, safran, doré - Il faudrait aussi
un rayon de soleil avec cette lumière particulière de Toscane ou de Provence, mais
en Espagne, vers Tarragone, en Bourgogne ou dans l'Aude, ça marche aussi . On chercherait alors à lire
la pierre, à comprendre à quoi servait l'édifice : était-ce un pont ? Un aqueduc ? Une tour de guet ? Une maison ? Un temple peut être ? Puis
tandis que le soleil descendrait et ferait flamboyer le roc, on s'y verrait, on
s'imaginerait arpentant les rues, allant au marché, tirant de l'eau de ce puits
caché dans l'herbe ou faisant la sieste à l'ombre des oliviers .
Nous
sommes grecs, nous sommes latins, nous sommes romains : nous le sommes encore
par notre langue, nos habitudes, notre psyché . Nous le sommes encore plus en
été quand le temps ralentit voire s'arrête et qu'on prend le temps de regarder.
Parfois le Tour de France nous promène dans les paysages à pierres humaines -
pas la roche brute des montagnes non, les pierres taillées par les hommes puis
assemblées en œuvres pensées par des architectes - et c'est là que la France
latine m'éclate au visage . L'étape de Marseille en vue aérienne c'est à dire loin des scories
de l'époque actuelle ( sans les voitures, les monuments modernes, les immeubles
hideux ) cette étape a montré Massilia plus que Marseille . Vus d'en haut les
bateaux sont tous pareils, et la Méditerranée est identique à ce qu'elle était
il y a 2000 ans, je le sais j'y étais .
C'est
une impression que je ressens parfois : il suffit de quelques pierres ...
celles du Pont du Gard ou des Arènes de Nîmes . Avant le tourisme qui a encagé
le Pont, on se baignait dans le Gard,
comme les enfants romains ont dû le faire avant nous . L'eau était fraîche et
il y avait de grandes pierres plates où l'on se séchait au soleil .
Plus majestueuses encore les pierres du
théâtre antique d'Orange, explorées de bas en haut pendant des années,
observées à loisir à la terrasse des cafés en face . Le mur d'Arausio s'élance
vers le ciel emportant les bruits de la ville d'antan . Pourtant ils sont
encore là chaque jeudi, jour de marché, les mêmes clameurs et les mêmes marchands d'olives, figues et
dattes . Pierres dorées d'Empùries sur la Costa Brava avec la Méditerranée en fond d'écran, les vétérans de Pompée y partaient en retraite . Comme elles sont émouvantes, ces pierres façonnées par les hommes ! On y décèle parfois un défaut, un coup de ciseau de travers . Le tailleur de pierre a peut être été distrait dans son travail par cette belle fille, oui celle qui revient du port avec son panier plein de crabes . Elle a les hanches qui roulent et elle lui a souri en passant alors ... Les pierres, même les plus simples, surtout les plus simples me parlent et me disent leur histoire . C'est vrai, je le sais, j'y étais . Il suffit de quelques pierres ...
Il
suffit aussi de quelques mots : d'un Richard intitulant son article "Fin
et caetera ", d'un Urios (déjà, ce nom...) qui parle des Castrais comme
des "Olympiens", d'un chef
d'état se proclamant Jupiter, d'un
Herrero évoquant ses Méditerranées en termes antiques... et la machine à rêves
se met en route . Ils sont là, les Latins, parmi nous, en nous .
Oh bien
sûr j'ai un peu lu Cicéron, César, Pline "De plusieurs endroits du Mont
Vésuve, on voyait briller de larges flammes et un vaste embrasement dont les
ténèbres augmentaient l'éclat..." C'était à Pompéi, j'y
étais... Plaute,
Tite-Live, plus tard Virgile "Arma virumque cano..." Je
chante les armes et l'homme qui, premier entre tous, chassé par le destin des
bords de Troie, vint en Italie, aux rivages où s’élevait Lavinium .
Oui je
me souviens, tout est vrai je l'ai vu, j'y étais. Il suffit
de quelques mots... Il suffit de quelques pierres..."