Parmi les grands joueurs français - Vincent Clerc, Aurélien Rougerie, Yannick Nyanga, Julien Pierre - qui ont mis, ces temps derniers, un terme à leur carrière sportive, Frédéric Michalak s'impose hors catégorie en rouge et noir. Non pas au titre de premier enfant de la presse people avant Sébastien Chabal et Mathieu Bastareaud, ou que sa médiatisation parfois exagérée reposât davantage sur son charisme que sur ses performances, mais par une lente mais sûre maturation. L'homme s'est imposé derrière le joueur.
Jeune retraité après dix-huit saisons de rugby, l'enfant de Ramonville, fils d'un maçon et d'une femme de ménages, s'est tourné vers les autres bien avant le coup de sifflet final. On lui connaissait des actions de génie : elles sont désormais sociales, en direction de jeunes - souvent oubliés - des quartiers. Puisque le rugby est irrigué par les vertus de solidarité, pas étonnant que le combat de Frédéric Michalak porte sur le soutien scolaire, la mixité, la parité, l'art, l'emploi et la formation.
Ces principes, il les a fait siens au sein du club de Blagnac dont il est l'actionnaire principal. Quinze kilomètres - un symbole - séparent Ramonville de Blagnac, en banlieue toulousaine. A ceux qui critiquent, parfois à juste titre, l'inertie et la morgue du personnel politique quel qu'il soit et d'où qu'il parle, se rappeler qu'il est possible d'agir sans attendre que d'autres le fassent pour nous. Loupiot à la chaussette baissée sur de fines jambes arquées, Frédéric Michalak avance ainsi à pas de géant.
Nous l'écrivions dans une précédente chronique, la nostalgie est un virus dont il faut se défaire. Ce qui était mieux avant n'est pas obligatoirement pire aujourd'hui. «Je ne pense pas que notre sport ait changé, qu'il soit devenu plus violent, note au diaposon Michalak dans une remarquable interview accordée à notre confrère et copain de L'Equipe, Karim Ben-Ismaïl. Il y a toujours eu des gros accidents ou des mecs K.-O. C'est un sport de combat (...) Les mecs sont de plus en plus athlétiques, vont de plus en plus vite alors que la formation technique n'a pas suivi. Beaucoup de commotions cérébrales sont dues à des erreurs de placement technique lors du plaquage.»
Passé de la liberté absolue d'expression à l'organisation à quatre temps incompressibles, de la créativité à la «gestion» d'un match, de la fluidité aux schémas de jeu, Frédéric Michalak avoue s'être «réadapté» et parfois «recroquevillé.» Mais, ajoute-t-il, «j'ai pris du plaisir à découvrir cette manière de jouer des Australiens,» lesquels avaient initié leur révolution (organisation pensée, combinaison préalable, soutiens obligatoires, angles de course rentrants, options multiples en sortie) en 1984 lors d'une tournée victorieuse dans les Iles Britanniques sous la férule de leur coach, Alan Jones, pour atteindre deux points d'orgue en 1991 et en 1999 avec Bob Dwyer puis Rod Macqueen, trophée Webb-Ellis dans les mains.
Demi tricolore mais caractère entier, Frédéric Michalak est papa d'un petit Hugo, six ans, qui découvre la balle ovale à l'école de rugby. Quelle ne fut pas la surprise de son international de père quand l'éducateur lui a sorti une feuille de statistiques : «Les gamins, il faut qu'ils s'amusent. Faut pas qu'ils plaquent jusqu'à au moins douze ans, s'insurge Michalak. Ils doivent jouer sur le mouvement, pas être spécialisés à un poste. C'est trop tôt. Ils devraient apprendre à faire des passes des deux côtés, à jouer des situations de deux contre un, ou de trois contre deux, à savoir taper dans un ballon. Et, surtout, prendre du plaisir !» Du pur jus de kiwi.
«La vraie essence de l'homme se présente dans son visage,» assure Emmanuel Lévinas. Regardez celui de Frédéric Michalak, épanoui. Mais surtout considérons son regard, tourné vers les autres. Il s'agit dans ce face-à-face de faire «l'expérience de l'infini», interpelle le philosophe. Le visage d'autrui vient rompre l'ordre de notre existence qui (parfois) tourne en rond. Car, en effet, sans le surgissement dont parle Lévinas, nous pourrions vivre dans un entre-nous, repliés, groupés mais guère pénétrants. La rencontre nous oriente alors - c'est un mouvement - vers l'Autre. S'installe ainsi l'idée d'infini, ou plutôt une idée de l'infini. Et son corollaire qui est l'éthique, à hauteur ou en profondeur, selon. Autrement dit notre devoir de transmission.
Si vous ne savez pas quoi lire cet été pour rester à la plage : le Dictionnaire des penseurs (éditions Honoré Champion) est disponible. Co-écrit avec le philosophe et demi de mêlée Christophe Schaeffer. Voyage avec cent personnalités qui ont marqué notre histoire et changé notre façon de voir le monde et d'agir.
vendredi 29 juin 2018
dimanche 24 juin 2018
Scores et scories
Nous pourrons signaler aux générations futures à quel point la période noire fut une domination sans partage du rugby néo-zélandais. Comme en leur temps le FC Lourdes, l'AS Béziers et le Stade Toulousain d'Ovalie hexagonale - une étonnante figure géométrique que je vous invite à dessiner si vous n'avez pas mieux à faire durant l'intersaison -, les All Blacks assurent à la fois le spectacle tout en renouvelant le genre. Ils n'ont perdu qu'un seul test à domicile en huit ans, relève sur Twitter le journaliste Pierre Ammiche. Leur secret ? Avoir pris assez d'avance pour réfléchir au futur, l'anticiper, voire le modeler pour peu qu'ils disposent, et c'est le cas, de leviers politiques pour influer sur les grandes décisions, à commencer par le règlement.
Les Néo-Zélandais se nourrissent d'un système fédérateur, ruissellement qui permet à la base de recueillir les effets bénéfiques du haut niveau, vases communicants qui font remonter les fleurs écloses sur le terreau provincial vers le bouquet final, cette équipe des All Blacks à la fois vitrine et laboratoire. Et si l'on voit l'ailier Rieko Ioane inscrire un triplé à Dunedin après son doublé à Auckland, se dire qu'il est le pur produit d'une pensée orchestrée sur papier millimétré. Rien n'est laissé au hasard au pays du Long Nuage Blanc. Pour combien de temps encore ? Une décennie ? C'est possible.
En tout cas, tant que nous récupèrerons les scories néo-zélandaises pendant que les All Blacks meublent confortablement le score (52-11, 26-13, 49-14), notre position a peu de chance de varier. Pis, elle peut nous entraîner encore plus bas que nous ne sommes, à savoir toucher l'humiliation d'une non-qualification en quart de finale de la Coupe du monde 2019. Avec l'Angleterre et l'Argentine dans notre poule, nous en prenons d'ailleurs tout droit le chemin. Cela dit, un mal pour un bien, les Anglais ont vécu ces affres en 2015. Il est donc possible de s'en relever pour peu qu'une vraie prise de conscience succède au désespoir.
L'image est marquante. Rieko Ioane plonge cinq fois en deux tests dans l'en-but français tandis que Toulon fait signer son prédécesseur au poste chez les All Blacks, Julian Savea, qui ferait encore le bonheur de n'importe quelle autre sélection nationale. Savea - non-sélectionnable pour le XV de France - dans le Top 14, c'est un Bleuet de moins en lice. A ce train, il ne faudra pas s'étonner s'ils sont peu nombreux, les champions du monde moins de vingt ans, à monter dans les wagons du haut niveau. «Demandez-vous ce que vous voulez faire avec vos jeunes joueurs...» s'interrogeait Steve Tew, le boss de la fédé kiwi dans Midi-Olympique, la semaine dernière, quand Leo Faure (digne fils de son père Bernard, excellent journaliste de La Montagne) lui demandait s'il avait une solution à offrir au rugby français.
Au sortir d'une saison médiocre, le Stade Rochelais, parangon de vertus porté hier au pinacle par l'opinion publique et les médias, les observateurs et les connaisseurs, les techniciens et les dirigeants, prend le risque d'attendre cinq mois la venue de son prochain manager, l'ex-All Black Jono Gibbes, laissant joueurs et entraîneurs maritimes à marée basse durant la première partie du Championnat. Ainsi, dans ce Top 14 qui s'annonce plus serré que jamais, Montpellier et le Stade Français se présentent en provinces sud-africaines exilées, La Rochelle en dépôt néo-zélandais et Toulon en maison de retraite pour internationaux refusés. Mieux vaut en sourire.
Le rugby français est géré en économie de marché. Les salaires en constante augmentation dérégulent l'offre et la demande. Dans une bulle spéculative, le Top 14 va finir par imploser. Pendant ce temps, nous pourrons toujours apprécier les performances irlandaises pour ce qu'elles sont, cliniques dans le Tournoi des Six Nations (Grand Chelem), la Champions Cup (titre continental) et les tournées dans l'hémisphère sud (série de tests face à l'Australie), nées de l'obstination d'une nation à ne pas mourir, ainsi capable de se renouveler en donnant plein pouvoir à sa fédération, en irriguant les provinces, choyant ses internationaux et se donnant un technicien doué de vision - Joe Schmidt, encore un Néo-Zélandais - pour construire un jeu adapté à sa psyché. Tout est dans l'Erin.
Depuis 1988, et la révolution australienne, Galles, Argentine, Ecosse, Afrique du Sud et Angleterre ont su briser une spirale négative, imaginer une articulation, changer de paradigme et se réinventer. Pourquoi pas la France ? Parce que nous préférons caresser les supporteurs dans le sens du poil en valorisant le Top 14, remplir les travées en multipliant les produits d'appel - les fameuses stars étrangères - et les caisses en augmentant les prix des places - La Rochelle, là encore, mais pas que. Une approche égocentrée, étriquée, centrifuge et partisane qui mène inexorablement, chaque saison davantage, à la faillite du XV de France. Dans la plus grande indifférence.
Cette tournée en Nouvelle-Zélande - qui ne sert à rien - m'oblige à dresser depuis un mois le même constat. Le rugby d'élite ne se construit pas avec des bons sentiments. Castres champion en puisant dans ses vertus était un baume sur nos plaies qui depuis 2011 ne parviennent pas à se refermer. Heureusement que cette année-là, le XV de France n'est pas devenu champion du monde sinon nous aurions été obligés d'ériger malgré nous la métamorphose des cloportes (Alphonse Boudard, pour ceux qui demandent) et la thérapie du houblon en panacée.
Il n'y a pas que nos illusions qui sont mortes en ce mois de juin finissant : l'esprit des Barbarians français, lui aussi, a disparu dans le nuage blanc trop long pour nos courtes vues. La soi-disant réserve du chef n'est qu'une piquette amère, surclassée par la classe biberon des provinces néo-zélandaises, Crusaders et Highlanders lançant leur relève face à ce qui n'est plus l'émanation du French-Flair mais un avatar de nos tares domestiques : technique approximative, initiatives individuelles, déficit de puissance. L'association Garbajosa-Urios n'y a rien pu faire. L'initiateur du jeu d'attaque rochelais «axe-large» et l'artisan spécialiste de l'esprit de groupe depuis l'Ain jusqu'à Tarn ont échoué à donner de l'éclat à l'arrière-ban tricolore. C'est tout dire.
«Songe à la douceur d'aller vivre là-bas, au pays qui te ressemble» écrit le poète Charles Baudelaire. Nous dilatons l'espace flou et le temps voilé. En regardant devant, nous ne parvenons pas à nous séparer des souvenirs vécus. «Si proche, si loin», encrent les plumitifs en panne d'inspiration pour titrer la défaite encourageante en s'imaginant philosophes. Mais il manque l'essentiel. Nous avons le mal de ce pays. Notre patrie, ici le rugby, fait de nous des migrants, interdit d'accès. Ce jeu, que nous avions considérablement amélioré il y a quelques décennies, nous est maintenant refusé. Ce que nous pratiquons n'est qu'une illusion. Un de mes frères en pensée, Alain Rossignol, répétait que seule l'utopie permet d'éteindre la nostalgie. Contributeurs de ce Côté Ouvert qui mérite plus que jamais son nom, créons l'avenir après avoir trop plaint le présent.
Les Néo-Zélandais se nourrissent d'un système fédérateur, ruissellement qui permet à la base de recueillir les effets bénéfiques du haut niveau, vases communicants qui font remonter les fleurs écloses sur le terreau provincial vers le bouquet final, cette équipe des All Blacks à la fois vitrine et laboratoire. Et si l'on voit l'ailier Rieko Ioane inscrire un triplé à Dunedin après son doublé à Auckland, se dire qu'il est le pur produit d'une pensée orchestrée sur papier millimétré. Rien n'est laissé au hasard au pays du Long Nuage Blanc. Pour combien de temps encore ? Une décennie ? C'est possible.
En tout cas, tant que nous récupèrerons les scories néo-zélandaises pendant que les All Blacks meublent confortablement le score (52-11, 26-13, 49-14), notre position a peu de chance de varier. Pis, elle peut nous entraîner encore plus bas que nous ne sommes, à savoir toucher l'humiliation d'une non-qualification en quart de finale de la Coupe du monde 2019. Avec l'Angleterre et l'Argentine dans notre poule, nous en prenons d'ailleurs tout droit le chemin. Cela dit, un mal pour un bien, les Anglais ont vécu ces affres en 2015. Il est donc possible de s'en relever pour peu qu'une vraie prise de conscience succède au désespoir.
L'image est marquante. Rieko Ioane plonge cinq fois en deux tests dans l'en-but français tandis que Toulon fait signer son prédécesseur au poste chez les All Blacks, Julian Savea, qui ferait encore le bonheur de n'importe quelle autre sélection nationale. Savea - non-sélectionnable pour le XV de France - dans le Top 14, c'est un Bleuet de moins en lice. A ce train, il ne faudra pas s'étonner s'ils sont peu nombreux, les champions du monde moins de vingt ans, à monter dans les wagons du haut niveau. «Demandez-vous ce que vous voulez faire avec vos jeunes joueurs...» s'interrogeait Steve Tew, le boss de la fédé kiwi dans Midi-Olympique, la semaine dernière, quand Leo Faure (digne fils de son père Bernard, excellent journaliste de La Montagne) lui demandait s'il avait une solution à offrir au rugby français.
Au sortir d'une saison médiocre, le Stade Rochelais, parangon de vertus porté hier au pinacle par l'opinion publique et les médias, les observateurs et les connaisseurs, les techniciens et les dirigeants, prend le risque d'attendre cinq mois la venue de son prochain manager, l'ex-All Black Jono Gibbes, laissant joueurs et entraîneurs maritimes à marée basse durant la première partie du Championnat. Ainsi, dans ce Top 14 qui s'annonce plus serré que jamais, Montpellier et le Stade Français se présentent en provinces sud-africaines exilées, La Rochelle en dépôt néo-zélandais et Toulon en maison de retraite pour internationaux refusés. Mieux vaut en sourire.
Le rugby français est géré en économie de marché. Les salaires en constante augmentation dérégulent l'offre et la demande. Dans une bulle spéculative, le Top 14 va finir par imploser. Pendant ce temps, nous pourrons toujours apprécier les performances irlandaises pour ce qu'elles sont, cliniques dans le Tournoi des Six Nations (Grand Chelem), la Champions Cup (titre continental) et les tournées dans l'hémisphère sud (série de tests face à l'Australie), nées de l'obstination d'une nation à ne pas mourir, ainsi capable de se renouveler en donnant plein pouvoir à sa fédération, en irriguant les provinces, choyant ses internationaux et se donnant un technicien doué de vision - Joe Schmidt, encore un Néo-Zélandais - pour construire un jeu adapté à sa psyché. Tout est dans l'Erin.
Depuis 1988, et la révolution australienne, Galles, Argentine, Ecosse, Afrique du Sud et Angleterre ont su briser une spirale négative, imaginer une articulation, changer de paradigme et se réinventer. Pourquoi pas la France ? Parce que nous préférons caresser les supporteurs dans le sens du poil en valorisant le Top 14, remplir les travées en multipliant les produits d'appel - les fameuses stars étrangères - et les caisses en augmentant les prix des places - La Rochelle, là encore, mais pas que. Une approche égocentrée, étriquée, centrifuge et partisane qui mène inexorablement, chaque saison davantage, à la faillite du XV de France. Dans la plus grande indifférence.
Cette tournée en Nouvelle-Zélande - qui ne sert à rien - m'oblige à dresser depuis un mois le même constat. Le rugby d'élite ne se construit pas avec des bons sentiments. Castres champion en puisant dans ses vertus était un baume sur nos plaies qui depuis 2011 ne parviennent pas à se refermer. Heureusement que cette année-là, le XV de France n'est pas devenu champion du monde sinon nous aurions été obligés d'ériger malgré nous la métamorphose des cloportes (Alphonse Boudard, pour ceux qui demandent) et la thérapie du houblon en panacée.
Il n'y a pas que nos illusions qui sont mortes en ce mois de juin finissant : l'esprit des Barbarians français, lui aussi, a disparu dans le nuage blanc trop long pour nos courtes vues. La soi-disant réserve du chef n'est qu'une piquette amère, surclassée par la classe biberon des provinces néo-zélandaises, Crusaders et Highlanders lançant leur relève face à ce qui n'est plus l'émanation du French-Flair mais un avatar de nos tares domestiques : technique approximative, initiatives individuelles, déficit de puissance. L'association Garbajosa-Urios n'y a rien pu faire. L'initiateur du jeu d'attaque rochelais «axe-large» et l'artisan spécialiste de l'esprit de groupe depuis l'Ain jusqu'à Tarn ont échoué à donner de l'éclat à l'arrière-ban tricolore. C'est tout dire.
«Songe à la douceur d'aller vivre là-bas, au pays qui te ressemble» écrit le poète Charles Baudelaire. Nous dilatons l'espace flou et le temps voilé. En regardant devant, nous ne parvenons pas à nous séparer des souvenirs vécus. «Si proche, si loin», encrent les plumitifs en panne d'inspiration pour titrer la défaite encourageante en s'imaginant philosophes. Mais il manque l'essentiel. Nous avons le mal de ce pays. Notre patrie, ici le rugby, fait de nous des migrants, interdit d'accès. Ce jeu, que nous avions considérablement amélioré il y a quelques décennies, nous est maintenant refusé. Ce que nous pratiquons n'est qu'une illusion. Un de mes frères en pensée, Alain Rossignol, répétait que seule l'utopie permet d'éteindre la nostalgie. Contributeurs de ce Côté Ouvert qui mérite plus que jamais son nom, créons l'avenir après avoir trop plaint le présent.
lundi 18 juin 2018
Sacre à Béziers
Dès la fin de sa finale de Championnat du monde remportée dans le stade de la Méditerrané en féria face à l'Angleterre, il faut avoir la reconnaissance chevillée au corps, la franchise comme viatique et une bonne dose d'assurance pour rendre ainsi hommage à la formation française, ses pôles Espoirs et son pôle France. Surtout quand on sait que la FFR et la DTN ont décidé, il y a un an, de fermer ces derniers. C'est ainsi que le capitaine et demi de mêlée des Bleuets, Arthur Coville, a marqué de son empreinte ce sacre mondial en catégorie moins de vingt.
Douze ans plus tôt, les moins de vingt-et-un ans français avaient ouvert la voie. Jamais nation de l'hémisphère nord n'avait été titrée dans cette catégorie. Les lauréats se nommaient Lionel Beauxis, Maxime Médard, Sébastien Tillous-Borde, Fulgence Ouedraogo, Damien Chouly, Maxime Mermoz, Julien Le Devedec, Guilhem Guirado, Thomas Domingo... Entraînés par le duo Didier Retière - emile Ntamack. On retrouvera tout ce beau monde - ou presque - en finale du Mondial 2011.
Depuis 2006, la relève française avait disparu du tableau d'honneur, remplacée six fois par la Nouvelle-Zélande entre 2008 et 2017. Elle ressurgit alors que la filière bleue et ses quatorze pôles Espoirs ont été démantelés par la FFR de Bernard Laporte avec l'aval de la DTN, remplacés par vingt-cinq Académies «pour plus de proximité», ainsi que l'a expliqué le directeur de la formation fédérale, l'ancien ouvreur international toulousain, Philippe Rougé-Thomas, sur le site FFR. Il avait ajouté : «Le joueur pourra dorénavant s'entraîner avec son équipe de club».
Une synergie nouvelle, donc, liant jeunes internationaux et clubs d'élite, dont le socle est construit à partir de structures «implantées en milieu scolaire, avec aménagement des horaires pour porter au mieux le double, voire le triple projet de chaque élève», explique le DTN Didier Retière qui sait de quoi il parle puisque ses deux fils, Arthur et Edgar, passés par les différents pôles, évoluent au plus haut niveau. Reste que la réaction du capitaine des Bleuets, le Parisien Arthur Coville, repose sur un autre constat : «Sans notre année commune à Marcoussis, je ne sais pas ce que ce groupe serait», avait-il déclaré dans L'Equipe la veille de cette finale.
Ainsi cette équipe de France juniors est la dernière qui peut se prévaloir du label bleu estampillé Marcoussis. La suite sera une autre histoire, même si d'après les cadres fédéraux, plusieurs belles générations chez les «moins de» sont prêtes à éclore d'ici peu. Un chapitre s'est donc refermé sous le soleil et dans les clameurs de Béziers. Tout un symbole. Car si le nouveau modus operandi des équipes de France passe par une convention, quid du contenu ?
«Il faut que le jeu produit dans les clubs corresponde à ce qui est attendu dans les formation des joueurs de haut niveau. On veut créer un terreau commun, reconnait Didier Retière. L'enjeu est de recréer une formation à a la française. On a été au bout du régionalisme. Il faut désormais retrouver l'état d'esprit du jeu à la française, dur et engagé, mais également conçu sur des prises d'initiative.» Louable mais encore trop vague. Exit donc la méthode deleplacienne dite globale, prônée par Pierre Villepreux en 2002, lorsqu'il était DTN.
Que Béziers soit le terminus doré d'un principe désormais caduque nous rappelle les querelles ô combien vivifiantes entre les tenants de la prise rapide et directe de la ligne d'avantage (Pierre Conquet et Jean Devaluez, les Fondamentaux du rugby) et ceux de la polyvalence des rôles et de l'intelligence situationnelle (René Deleplace, Rugby de mouvement, rugby total), poussées à leur paroxysme lors de débats enflammés par presse interposée entre Raoul Barrière, André Quilis, Gérard Murillo, Michel Peuchlestrade, Michel Ringeval, Pierre Villepreux, Jacques Fouroux et Daniel Herrero. Rien qu'avec ce name droping, on se sent revivre. Ce qu'on appelait débat à l'époque - entre 1982 et 1990 - tendrait néanmoins aujourd'hui à devenir polémique.
Reste qu'il débouche sur une réflexion et une prise de conscience. C'est bien là l'essentiel. Si les U20 sont champions du monde, les entraîneurs français ont perdu dans le même temps la main dans le rugby français d'élite. Et avec eux les managers, les préparateurs physiques, les analystes vidéo et les consultants. A l'étranger, les portes se ferment aussi pour les techniciens français. «Nous nous sommes laissés affaiblir, inhiber par l'incompétence de nos dirigeants et les intérêts particuliers des uns et des autres», regrette Christian Gajan, ancien entraîneur de Toulouse, Castres et Bayonne, mais aussi de Trevise, Zebre et Fukuoka entre 1990 et 2013.
Edgar Morin, philosophe de l'éthique, écrit : «Notre société sépare plus qu'elle ne relie (...) mais l'humanité est améliorable. Sans pour autant croire qu'elle va nécessairement s'améliorer.» Pour lui, l'homme serait un être aveuglé par le morcellement du savoir et le triomphe des spécialistes, somnambulisme qui masque les réalités humaines au profit de statistiques dénuées de sens, écrit-on dans le Dictionnaire des penseurs (p. 241). Il est sans doute temps pour le rugby français, porté aujourd'hui par une reconnaissance mondiale tant recherchée, de se nourrir des différences plutôt que de rechercher une trop grande simplification.
Douze ans plus tôt, les moins de vingt-et-un ans français avaient ouvert la voie. Jamais nation de l'hémisphère nord n'avait été titrée dans cette catégorie. Les lauréats se nommaient Lionel Beauxis, Maxime Médard, Sébastien Tillous-Borde, Fulgence Ouedraogo, Damien Chouly, Maxime Mermoz, Julien Le Devedec, Guilhem Guirado, Thomas Domingo... Entraînés par le duo Didier Retière - emile Ntamack. On retrouvera tout ce beau monde - ou presque - en finale du Mondial 2011.
Depuis 2006, la relève française avait disparu du tableau d'honneur, remplacée six fois par la Nouvelle-Zélande entre 2008 et 2017. Elle ressurgit alors que la filière bleue et ses quatorze pôles Espoirs ont été démantelés par la FFR de Bernard Laporte avec l'aval de la DTN, remplacés par vingt-cinq Académies «pour plus de proximité», ainsi que l'a expliqué le directeur de la formation fédérale, l'ancien ouvreur international toulousain, Philippe Rougé-Thomas, sur le site FFR. Il avait ajouté : «Le joueur pourra dorénavant s'entraîner avec son équipe de club».
Une synergie nouvelle, donc, liant jeunes internationaux et clubs d'élite, dont le socle est construit à partir de structures «implantées en milieu scolaire, avec aménagement des horaires pour porter au mieux le double, voire le triple projet de chaque élève», explique le DTN Didier Retière qui sait de quoi il parle puisque ses deux fils, Arthur et Edgar, passés par les différents pôles, évoluent au plus haut niveau. Reste que la réaction du capitaine des Bleuets, le Parisien Arthur Coville, repose sur un autre constat : «Sans notre année commune à Marcoussis, je ne sais pas ce que ce groupe serait», avait-il déclaré dans L'Equipe la veille de cette finale.
Ainsi cette équipe de France juniors est la dernière qui peut se prévaloir du label bleu estampillé Marcoussis. La suite sera une autre histoire, même si d'après les cadres fédéraux, plusieurs belles générations chez les «moins de» sont prêtes à éclore d'ici peu. Un chapitre s'est donc refermé sous le soleil et dans les clameurs de Béziers. Tout un symbole. Car si le nouveau modus operandi des équipes de France passe par une convention, quid du contenu ?
«Il faut que le jeu produit dans les clubs corresponde à ce qui est attendu dans les formation des joueurs de haut niveau. On veut créer un terreau commun, reconnait Didier Retière. L'enjeu est de recréer une formation à a la française. On a été au bout du régionalisme. Il faut désormais retrouver l'état d'esprit du jeu à la française, dur et engagé, mais également conçu sur des prises d'initiative.» Louable mais encore trop vague. Exit donc la méthode deleplacienne dite globale, prônée par Pierre Villepreux en 2002, lorsqu'il était DTN.
Que Béziers soit le terminus doré d'un principe désormais caduque nous rappelle les querelles ô combien vivifiantes entre les tenants de la prise rapide et directe de la ligne d'avantage (Pierre Conquet et Jean Devaluez, les Fondamentaux du rugby) et ceux de la polyvalence des rôles et de l'intelligence situationnelle (René Deleplace, Rugby de mouvement, rugby total), poussées à leur paroxysme lors de débats enflammés par presse interposée entre Raoul Barrière, André Quilis, Gérard Murillo, Michel Peuchlestrade, Michel Ringeval, Pierre Villepreux, Jacques Fouroux et Daniel Herrero. Rien qu'avec ce name droping, on se sent revivre. Ce qu'on appelait débat à l'époque - entre 1982 et 1990 - tendrait néanmoins aujourd'hui à devenir polémique.
Reste qu'il débouche sur une réflexion et une prise de conscience. C'est bien là l'essentiel. Si les U20 sont champions du monde, les entraîneurs français ont perdu dans le même temps la main dans le rugby français d'élite. Et avec eux les managers, les préparateurs physiques, les analystes vidéo et les consultants. A l'étranger, les portes se ferment aussi pour les techniciens français. «Nous nous sommes laissés affaiblir, inhiber par l'incompétence de nos dirigeants et les intérêts particuliers des uns et des autres», regrette Christian Gajan, ancien entraîneur de Toulouse, Castres et Bayonne, mais aussi de Trevise, Zebre et Fukuoka entre 1990 et 2013.
Edgar Morin, philosophe de l'éthique, écrit : «Notre société sépare plus qu'elle ne relie (...) mais l'humanité est améliorable. Sans pour autant croire qu'elle va nécessairement s'améliorer.» Pour lui, l'homme serait un être aveuglé par le morcellement du savoir et le triomphe des spécialistes, somnambulisme qui masque les réalités humaines au profit de statistiques dénuées de sens, écrit-on dans le Dictionnaire des penseurs (p. 241). Il est sans doute temps pour le rugby français, porté aujourd'hui par une reconnaissance mondiale tant recherchée, de se nourrir des différences plutôt que de rechercher une trop grande simplification.
mercredi 13 juin 2018
Forger sa volonté
Si l'on en croit ses amis les plus proches, à la question «Comment ça va ?», il répondait invariablement «Ca s'arrange. Dans une semaine, ça ira mieux.» Guy Ligier s'est toujours lancé dans les différentes batailles qui émaillèrent son existence bouillonnante sans vraiment mesurer les difficultés. Pour d'autres elles auraient été infranchissables. Pour cet ancien talonneur, pugnace, déterminé, sans peur et doté d'une énergie folle, elles n'étaient qu'épreuves à disputer, opportunités offertes pour franchir un cap et surtout progresser.
Guy Ligier a été champion de France d'aviron en deux barrés au sortir de la Seconde guerre mondiale. Puis international militaire au talonnage et même, sous le maillot de Vichy, sélectionné dans l'antichambre du XV de France. Sans une vilaine déchirure musculaire à la cuisse mal guérie qui mit fin prématurément à sa carrière, il aurait pu rejoindre Jean Carrère, Amédée Domenech, Gérard Dufau et Michel Pébeyre dans le gotha ovale. C'est alors que privé de terrain, la passion motocycliste prit le dessus.
Champion de France en 500 cm3, il arrêta la compétition moto en 1959 pour se consacrer à son entreprise de travaux publics. Mais la césure fut de courte durée. Victorieux en 1963 de plusieurs petites courses dans une Porsche Carrera, il se lança à 33 ans dans la compétition automobile, s'alignant en F1 au Nurburgring au volant d'une Cooper-Maserati aux couleurs bleu France, puis d'une Brabham.
Avec son ami Jo Schlesser, il remporta sur une Ford 7 litres les 12 heures de Reims en 1967 (cf photo) avant de créer, l'année suivante, sa propre écurie de F2, fournie en McLaren M4A. «C'est de là qu'est née notre idée de construire une voiture.» Naquit la Ligier JS1, coupé dessiné par le designer italien Pietro Frua, à qui l'on doit, entre autres, la Citroën SM. En 1972, Guy Ligier engagea deux de ses prototypes aux 24 heures du Mans dont l'édition 2018 sera lancée samedi, peu après le coup de sifflet final du deuxième test du XV de France à Wellington.
Guy Ligier, qui lutta toute sa vie pour exister au milieu des grands constructeurs, disait à Johnny Rives, le pape de l'automobile à L'Equipe dans un article publié le 10 juin 1972 et exhumé par mon excellent confrère documentaliste Thierry Clémenceau : «Le rugby est un sport qui a marqué mon tempérament. C'est un jeu rude. L'engagement physique est très dur, surtout devant. Pour être le meilleur, il faut être super-volontaire : il n'y a pas de cadeau. Mon volonté s'est forgée dans ces durs combats. Cela a été extrêmement important dans ce que devint ensuite ma vie.»
En 1975, la Ligier JS2 terminait à la deuxième place des 24 heures du Mans. En 1980, l'écurie Ligier (avec la JS15) frisait le titre mondial en F1. Puis l'écurie fut rachetée en 1997 par Alain Prost. Mais ceci est une autre histoire. Entre temps, son pilote fétiche, Jacques Laffitte, grand fan de rugby - «Je me serais bien vu demi de mêlée», m'assurait-il, et il en avait le mental et le gabarit - avait remporté six Grands Prix au volant d'une Ligier, dont le nom a été remis sur le devant de la scène en 2014, au Mans. Un an avant le décès de son créateur. Et qui y sera, en nombre, cette fois-ci encore, à l'initiative, entre autres, d'Olivier Panis.
Je ne veux pas préfigurer le résultat du deuxième test au pays du Long Nuage Blanc mais les Tricolores gagneraient à s'inspirer de la ténacité, de l'enthousiasme et de l'énergie de ce bâtisseur, qui rajeunissait «de dix ans» chaque fois qu'il inventait un prototype, voiturette incluse. A l'époque où je suivais pour L'Equipe la F1 et le rallye, j'ai ainsi pu rencontrer et surtout échanger longuement et chaleureusement grâce au rugby avec Franck Williams, David Coulthard, Ross Brawn, Eddie Jordan, mais aussi Guy Fréquelin et Daniel Elena, élevés au rugby, sport d'éducation s'il en est.
Que ce soit à la poursuite d'un ballon ovale ou sur piste, l'esprit de compétition permet de puiser au fond de soi des ressources insoupçonnées. Victorieux des Baby Blacks en demi-finale du Championnat du monde des moins de vingt ans, les Bleuets nous rappellent que la fatalité n'est pas inscrite au vocabulaire de ceux qui se destinent à évoluer au plus haut niveau. Sans aller jusqu'à parler de transcendance, trop souvent utilisé hors de propos, un mot symbolise cette aspiration au meilleur et je parle là du meilleur de soi-même. Ce mot, c'est dépassement.
Guy Ligier a été champion de France d'aviron en deux barrés au sortir de la Seconde guerre mondiale. Puis international militaire au talonnage et même, sous le maillot de Vichy, sélectionné dans l'antichambre du XV de France. Sans une vilaine déchirure musculaire à la cuisse mal guérie qui mit fin prématurément à sa carrière, il aurait pu rejoindre Jean Carrère, Amédée Domenech, Gérard Dufau et Michel Pébeyre dans le gotha ovale. C'est alors que privé de terrain, la passion motocycliste prit le dessus.
Champion de France en 500 cm3, il arrêta la compétition moto en 1959 pour se consacrer à son entreprise de travaux publics. Mais la césure fut de courte durée. Victorieux en 1963 de plusieurs petites courses dans une Porsche Carrera, il se lança à 33 ans dans la compétition automobile, s'alignant en F1 au Nurburgring au volant d'une Cooper-Maserati aux couleurs bleu France, puis d'une Brabham.
Avec son ami Jo Schlesser, il remporta sur une Ford 7 litres les 12 heures de Reims en 1967 (cf photo) avant de créer, l'année suivante, sa propre écurie de F2, fournie en McLaren M4A. «C'est de là qu'est née notre idée de construire une voiture.» Naquit la Ligier JS1, coupé dessiné par le designer italien Pietro Frua, à qui l'on doit, entre autres, la Citroën SM. En 1972, Guy Ligier engagea deux de ses prototypes aux 24 heures du Mans dont l'édition 2018 sera lancée samedi, peu après le coup de sifflet final du deuxième test du XV de France à Wellington.
Guy Ligier, qui lutta toute sa vie pour exister au milieu des grands constructeurs, disait à Johnny Rives, le pape de l'automobile à L'Equipe dans un article publié le 10 juin 1972 et exhumé par mon excellent confrère documentaliste Thierry Clémenceau : «Le rugby est un sport qui a marqué mon tempérament. C'est un jeu rude. L'engagement physique est très dur, surtout devant. Pour être le meilleur, il faut être super-volontaire : il n'y a pas de cadeau. Mon volonté s'est forgée dans ces durs combats. Cela a été extrêmement important dans ce que devint ensuite ma vie.»
En 1975, la Ligier JS2 terminait à la deuxième place des 24 heures du Mans. En 1980, l'écurie Ligier (avec la JS15) frisait le titre mondial en F1. Puis l'écurie fut rachetée en 1997 par Alain Prost. Mais ceci est une autre histoire. Entre temps, son pilote fétiche, Jacques Laffitte, grand fan de rugby - «Je me serais bien vu demi de mêlée», m'assurait-il, et il en avait le mental et le gabarit - avait remporté six Grands Prix au volant d'une Ligier, dont le nom a été remis sur le devant de la scène en 2014, au Mans. Un an avant le décès de son créateur. Et qui y sera, en nombre, cette fois-ci encore, à l'initiative, entre autres, d'Olivier Panis.
Je ne veux pas préfigurer le résultat du deuxième test au pays du Long Nuage Blanc mais les Tricolores gagneraient à s'inspirer de la ténacité, de l'enthousiasme et de l'énergie de ce bâtisseur, qui rajeunissait «de dix ans» chaque fois qu'il inventait un prototype, voiturette incluse. A l'époque où je suivais pour L'Equipe la F1 et le rallye, j'ai ainsi pu rencontrer et surtout échanger longuement et chaleureusement grâce au rugby avec Franck Williams, David Coulthard, Ross Brawn, Eddie Jordan, mais aussi Guy Fréquelin et Daniel Elena, élevés au rugby, sport d'éducation s'il en est.
Que ce soit à la poursuite d'un ballon ovale ou sur piste, l'esprit de compétition permet de puiser au fond de soi des ressources insoupçonnées. Victorieux des Baby Blacks en demi-finale du Championnat du monde des moins de vingt ans, les Bleuets nous rappellent que la fatalité n'est pas inscrite au vocabulaire de ceux qui se destinent à évoluer au plus haut niveau. Sans aller jusqu'à parler de transcendance, trop souvent utilisé hors de propos, un mot symbolise cette aspiration au meilleur et je parle là du meilleur de soi-même. Ce mot, c'est dépassement.
dimanche 10 juin 2018
Les pistes et le sillage
Trente points. Chaque adversaire des All Blacks doit se préparer à payer ce tarif. Il est constitué, pour mieux vous éclairer, de quatre essais, deux transformations et deux buts de pénalité. Trente points au tableau d'affichage, voici ce qui différencie une nation qui a fait du rugby sa religion et celles, dont la France, qui l'abordent comme une économie domestique, avec tout ce que cela comporte de satellites, qu'ils soient médiatiques, financiers, démographiques, politiques ou entrepreneuriaux.
Cette différence peut être chiffrée autrement : elle s'élève à 65 %. Si vous la rapportez à la durée d'un match, c'est le temps (environ 53 minutes) durant lequel une sélection nationale qui affronte la Nouvelle-Zélande - en pensant que le rugby n'est qu'une discipline sportive - peut se prendre à rêver. 65 %, c'est aussi le temps qu'elle passera dans son camp à tenter d'arrêter une marée noire. C'est enfin le pourcentage de fois où les All Blacks disposeront du ballon.
Le rugby, en Nouvelle-Zélande, est davantage qu'un sport : c'est une éducation insufflée dès le plus jeune à âge à l'école, garçons et filles mélangés, et pratiquée dans la rue de façon naturelle. C'est un choix, le premier, dans un pays du bout du monde, isolé, colonisé, qui ne doit sa reconnaissance qu'aux exploits de ses rugbymen et rugbywomen (victorieuses dimanche du Paris Sevens) dont on sait qu'ils et elles portent, maillot noir et fougère argentée, le deuil de l'adversaire. C'est surtout un formidable levier d'intégration au sein d'une nation devenue depuis trente ans l'Eldorado du Pacifique pour les Tongiens, les Samoans et les Fidjiens.
Alors oui, passer dans ces conditions de 11-11 à 52-11 entre la cinquante-troisième minute et le coup de sifflet final, n'est pas d'une rare violence car elle s'explique. Et pas seulement par les ballons conquis en touche et ceux contrés dans l'alignement, les taux de réussite au pied, les plaquages manqués et les turnovers. Elle s'explique par une sorte d'engagement national, un authentique contrat social, de riches investissements pour l'avenir. Affronter les All Blacks chez eux, c'est se confronter au sport dans ce qu'il a de plus sociétal.
Certes, l'arbitrage inconsistant d'un Anglais a laissé le XV de France à quatorze avant l'heure de jeu, précipitant une rupture. Mais elle n'aurait de toute façon pas tardé tant, à quinze contre quinze, le poids du talent collectif néo-zélandais commençait à faire pencher la balance. Et même si les All Blacks auraient dû se retrouver à treize - sport qu'ils pratiquent aussi plutôt pas mal - si M. Pearce avait infligé un carton jaune à Cane à la 59e minute pour plaquage «ceinture de sécurité» et à Tu'ungafasi pour percussion à l'épaule dans la zone du visage de l'infortuné Rémy Grosso, la victoire néo-zélandaise ne faisait pas vraiment de doute.
Samedi matin à l'heure du petit déjeuner, il sera question de revanche, un ressort dont on espère toujours qu'il fonctionne ; réaction d'orgueil qui nous ramène au 14 juillet 1979 derrière le panache blond de Jean-Pierre Rives. Autre temps. Part de notre histoire associée au chevalier du Guesclin et au général Bonaparte. Mais Wellington n'est pas Marignan, ni Arcole. Faire du bruit pour créer l'illusion n'amènera le XV de France qu'aux portes de l'exploit. Pour les pousser, il faudra autre chose que serrer la défense : créer, franchir et concrétiser.
Nous n'avons pas encore préparé la Coupe du monde 2019, c'est-à-dire mis en place un style qui nous ressemble et dans lequel les joueurs se réaliseraient, que la Nouvelle-Zélande, en ordre de marche, se projette déjà sur l'édition 2023 en France. Pour les doubles champions du monde, réagir n'est plus d'actualité : ils anticipent. Les All Blacks savent quel jeu l'emportera au Japon et imaginent à l'heure actuelle celui qui pourrait être pratiqué dans trois ou quatre ans. Ils ouvrent des pistes quand le reste de la planète ovale se place dans un sillage en croyant s'éviter les vagues.
Jeudi 14 juin sort en librairie le «Dictionnaire des penseurs», que j'ai eu le bonheur de coécrire avec Christophe Schaeffer. Aux éditions Honoré-Champion. 22 euros, 260 pages. Cent penseurs de tous les continents et de toutes les époques dont l'œuvre et les concepts influencent notre monde et ce que nous sommes.
Cette différence peut être chiffrée autrement : elle s'élève à 65 %. Si vous la rapportez à la durée d'un match, c'est le temps (environ 53 minutes) durant lequel une sélection nationale qui affronte la Nouvelle-Zélande - en pensant que le rugby n'est qu'une discipline sportive - peut se prendre à rêver. 65 %, c'est aussi le temps qu'elle passera dans son camp à tenter d'arrêter une marée noire. C'est enfin le pourcentage de fois où les All Blacks disposeront du ballon.
Le rugby, en Nouvelle-Zélande, est davantage qu'un sport : c'est une éducation insufflée dès le plus jeune à âge à l'école, garçons et filles mélangés, et pratiquée dans la rue de façon naturelle. C'est un choix, le premier, dans un pays du bout du monde, isolé, colonisé, qui ne doit sa reconnaissance qu'aux exploits de ses rugbymen et rugbywomen (victorieuses dimanche du Paris Sevens) dont on sait qu'ils et elles portent, maillot noir et fougère argentée, le deuil de l'adversaire. C'est surtout un formidable levier d'intégration au sein d'une nation devenue depuis trente ans l'Eldorado du Pacifique pour les Tongiens, les Samoans et les Fidjiens.
Alors oui, passer dans ces conditions de 11-11 à 52-11 entre la cinquante-troisième minute et le coup de sifflet final, n'est pas d'une rare violence car elle s'explique. Et pas seulement par les ballons conquis en touche et ceux contrés dans l'alignement, les taux de réussite au pied, les plaquages manqués et les turnovers. Elle s'explique par une sorte d'engagement national, un authentique contrat social, de riches investissements pour l'avenir. Affronter les All Blacks chez eux, c'est se confronter au sport dans ce qu'il a de plus sociétal.
Certes, l'arbitrage inconsistant d'un Anglais a laissé le XV de France à quatorze avant l'heure de jeu, précipitant une rupture. Mais elle n'aurait de toute façon pas tardé tant, à quinze contre quinze, le poids du talent collectif néo-zélandais commençait à faire pencher la balance. Et même si les All Blacks auraient dû se retrouver à treize - sport qu'ils pratiquent aussi plutôt pas mal - si M. Pearce avait infligé un carton jaune à Cane à la 59e minute pour plaquage «ceinture de sécurité» et à Tu'ungafasi pour percussion à l'épaule dans la zone du visage de l'infortuné Rémy Grosso, la victoire néo-zélandaise ne faisait pas vraiment de doute.
Samedi matin à l'heure du petit déjeuner, il sera question de revanche, un ressort dont on espère toujours qu'il fonctionne ; réaction d'orgueil qui nous ramène au 14 juillet 1979 derrière le panache blond de Jean-Pierre Rives. Autre temps. Part de notre histoire associée au chevalier du Guesclin et au général Bonaparte. Mais Wellington n'est pas Marignan, ni Arcole. Faire du bruit pour créer l'illusion n'amènera le XV de France qu'aux portes de l'exploit. Pour les pousser, il faudra autre chose que serrer la défense : créer, franchir et concrétiser.
Nous n'avons pas encore préparé la Coupe du monde 2019, c'est-à-dire mis en place un style qui nous ressemble et dans lequel les joueurs se réaliseraient, que la Nouvelle-Zélande, en ordre de marche, se projette déjà sur l'édition 2023 en France. Pour les doubles champions du monde, réagir n'est plus d'actualité : ils anticipent. Les All Blacks savent quel jeu l'emportera au Japon et imaginent à l'heure actuelle celui qui pourrait être pratiqué dans trois ou quatre ans. Ils ouvrent des pistes quand le reste de la planète ovale se place dans un sillage en croyant s'éviter les vagues.
Jeudi 14 juin sort en librairie le «Dictionnaire des penseurs», que j'ai eu le bonheur de coécrire avec Christophe Schaeffer. Aux éditions Honoré-Champion. 22 euros, 260 pages. Cent penseurs de tous les continents et de toutes les époques dont l'œuvre et les concepts influencent notre monde et ce que nous sommes.
dimanche 3 juin 2018
Etre bien entouré
Un de mes anciens collègues journalistes avait lancé il y a une vingtaine d'années, par provocation mais quand même : «Il faudrait faire disparaître Castres de la carte du rugby». Il en avait sans doute marre de prendre une voiture de location à l'aéroport de Toulouse et d'effectuer l'heure de trajet vers cette sous-préfecture du Tarn par une nationale incertaine pour taper le compte-rendu d'un match au milieu de supporteurs qui hurlaient : «Tous ensemble, tous ensemble». Au coup de sifflet final, samedi, au Stade de France, j'ai pensé à lui, qui ne mesurait pas à quel point Castres excelle dans le pied-de-nez.
A l'époque - début des années 80 - où la très grande majorité des soixante-quatre clubs de Première Division survivait avec ses recettes guichets et les subsides de la mairie, Castres allait bénéficier du soutien généreux d'un industriel du cru - à la façon du chapelier Jean Bourrel avec Quillan un demi-siècle plus tôt - pour remonter de la Deuxième division et se maintenir dans l'élite restreinte. Ce qui en fit un club à part, jalousé mais aussi cruellement ostracisé.
Phare de l'après-guerre dans le sillage de Siman et de Matheu, deux immenses internationaux, mais aussi de Coll - dont le célèbre café est longtemps resté l'épicentre du village - et de Pierre-Antoine, décédé trop tôt et dont la mémoire s'inscrivit jusqu'à il y a peu à l'entrée du stade, Castres avait ensuite lentement périclité et serait aujourd'hui, comme La Voulte, Narbonne, Carmaux, Dax, Bourgoin, Nice, Lourdes, Bagnères, Cognac, dans l'anonymat des divisions fédérales sans la manne Pierre-Fabre.
Par un renversement de valeurs, les Tarnais personnifient une forme toute relative de résistance à la mondialisation ovale outrancière entamée par Mourad Boudjellal à Toulon et portée à incandescence actuellement par Mohed Altrad avec Montpellier, en passant par Thomas Savare et Hans-Peter Wild au Stade Français, Jacky Lorenzetti au Racing 92, Laurent Marti à Bordeaux, sans oublier Pau, Clermont et La Rochelle, à savoir recruter un wagon de vieilles stars étrangères pour exister.
Qu'attendre d'autre d'anciens internationaux de l'hémisphère sud débarqués en Top 14 pour faire fructifier leur renom qu'un faible engagement quand il s'agit de se sacrifier pour un maillot, voire pour une idée. Sans parler de toute donner pour une ville, ce qui leur semblera à l'évidence toujours incongru ? N'allons pas chercher plus loin les baisses de régime de certaines équipes huppées depuis trois saisons. Champion de France, Castres a ainsi envoyé un message très clair.
Montpellier en a envoyé un autre, qui prolonge nos réflexions, ici, sur l'importance de la force mentale dans le sport, mais pas seulement. Comment expliquer autrement que par une faille psychologique devant la pression créée par l'événement les erreurs techniques du demi de mêlée international Ruan Pienaar. limite fautes professionnelles ? Sans parler de l'aveuglement coupable de Frans Steyn à refuser de négocier les surnombres et le manque d'implication des frères du Plessis et de l'ouvreur Aaron Cruden, pourtant tous grassement payés pour rapporter à leur patron ce Bouclier de Brennus tant convoité et satisfaire son ego.
J'ai aimé le cadrage-débordement de l'arrière Julien Dumora avant son essai, et le départ côté fermé derrière mêlée du numéro huit Ma'ama Vaipulu qui sonna l'heure du sursaut castrais. Deux gestes techniques qu'on croyait oubliés. Ca et les bières savourées la veille du match entre joueurs, sans provocation, juste pour le plaisir de partager quelque chose ensemble, un moment, une certaine idée de ce jeu et de ce qui le constitue. A la grande surprise du président Revol qui n'en croyait pas ses yeux. Comme disait Philippe Saint-André en 1994 à Edimbourg avant de vaincre l'Ecosse : «La pression, il vaut mieux l'avoir dans l'estomac que sur les épaules.»
Castres est désormais un symbole. Celui d'une compétition de vingt-six journées sur dix mois qui ne décerne aucun titre de champion et d'une phase de coupe en trois matches qui, elle, mène au Bouclier de Brennus. Celui d'un club décalé parce que malgré lui à contre-courant. Dans ce Top 14 qui s'annonce impitoyable la saison prochaine, trois villes n'ont jamais connu les joies d'un sacre : La Rochelle, Lyon et Montpellier. Les Héraultais y parviendront un jour prochain, à condition que leur boss, Mohed Altrad, l'homme le plus détesté du rugby français et de loin, ne se lasse pas avant terme.
Il est maintenant l'heure - matutinale - de regarder vers la Nouvelle-Zélande où le XV de France de Mathieu Bastareaud, capitaine tracassé, va jouer cartes sur table (je sais, elle est facile) pour tenter de remporter au moins un test-match sur les trois au programme du mois. Face aux All Blacks, le mental ne suffira pas. Il faudra, à l'image de Castres devant Montpellier, y mettre des valeurs hormonales en défense et de la précision en attaque. Et inversement. Vous dire aussi, que le «huit qu'on aime», William, est entré dans l'en-but lundi matin après un long combat. Parti heureux, touché par les marques d'affection qui lui ont été envoyé, entouré de ses anciens coéquipiers, dont notre ami et bloggeur Kudekask. Une pensée pour Florence, Marine, Lilou et Elisa, son épouse et ses filles.
A l'époque - début des années 80 - où la très grande majorité des soixante-quatre clubs de Première Division survivait avec ses recettes guichets et les subsides de la mairie, Castres allait bénéficier du soutien généreux d'un industriel du cru - à la façon du chapelier Jean Bourrel avec Quillan un demi-siècle plus tôt - pour remonter de la Deuxième division et se maintenir dans l'élite restreinte. Ce qui en fit un club à part, jalousé mais aussi cruellement ostracisé.
Phare de l'après-guerre dans le sillage de Siman et de Matheu, deux immenses internationaux, mais aussi de Coll - dont le célèbre café est longtemps resté l'épicentre du village - et de Pierre-Antoine, décédé trop tôt et dont la mémoire s'inscrivit jusqu'à il y a peu à l'entrée du stade, Castres avait ensuite lentement périclité et serait aujourd'hui, comme La Voulte, Narbonne, Carmaux, Dax, Bourgoin, Nice, Lourdes, Bagnères, Cognac, dans l'anonymat des divisions fédérales sans la manne Pierre-Fabre.
Par un renversement de valeurs, les Tarnais personnifient une forme toute relative de résistance à la mondialisation ovale outrancière entamée par Mourad Boudjellal à Toulon et portée à incandescence actuellement par Mohed Altrad avec Montpellier, en passant par Thomas Savare et Hans-Peter Wild au Stade Français, Jacky Lorenzetti au Racing 92, Laurent Marti à Bordeaux, sans oublier Pau, Clermont et La Rochelle, à savoir recruter un wagon de vieilles stars étrangères pour exister.
Qu'attendre d'autre d'anciens internationaux de l'hémisphère sud débarqués en Top 14 pour faire fructifier leur renom qu'un faible engagement quand il s'agit de se sacrifier pour un maillot, voire pour une idée. Sans parler de toute donner pour une ville, ce qui leur semblera à l'évidence toujours incongru ? N'allons pas chercher plus loin les baisses de régime de certaines équipes huppées depuis trois saisons. Champion de France, Castres a ainsi envoyé un message très clair.
Montpellier en a envoyé un autre, qui prolonge nos réflexions, ici, sur l'importance de la force mentale dans le sport, mais pas seulement. Comment expliquer autrement que par une faille psychologique devant la pression créée par l'événement les erreurs techniques du demi de mêlée international Ruan Pienaar. limite fautes professionnelles ? Sans parler de l'aveuglement coupable de Frans Steyn à refuser de négocier les surnombres et le manque d'implication des frères du Plessis et de l'ouvreur Aaron Cruden, pourtant tous grassement payés pour rapporter à leur patron ce Bouclier de Brennus tant convoité et satisfaire son ego.
J'ai aimé le cadrage-débordement de l'arrière Julien Dumora avant son essai, et le départ côté fermé derrière mêlée du numéro huit Ma'ama Vaipulu qui sonna l'heure du sursaut castrais. Deux gestes techniques qu'on croyait oubliés. Ca et les bières savourées la veille du match entre joueurs, sans provocation, juste pour le plaisir de partager quelque chose ensemble, un moment, une certaine idée de ce jeu et de ce qui le constitue. A la grande surprise du président Revol qui n'en croyait pas ses yeux. Comme disait Philippe Saint-André en 1994 à Edimbourg avant de vaincre l'Ecosse : «La pression, il vaut mieux l'avoir dans l'estomac que sur les épaules.»
Castres est désormais un symbole. Celui d'une compétition de vingt-six journées sur dix mois qui ne décerne aucun titre de champion et d'une phase de coupe en trois matches qui, elle, mène au Bouclier de Brennus. Celui d'un club décalé parce que malgré lui à contre-courant. Dans ce Top 14 qui s'annonce impitoyable la saison prochaine, trois villes n'ont jamais connu les joies d'un sacre : La Rochelle, Lyon et Montpellier. Les Héraultais y parviendront un jour prochain, à condition que leur boss, Mohed Altrad, l'homme le plus détesté du rugby français et de loin, ne se lasse pas avant terme.
Il est maintenant l'heure - matutinale - de regarder vers la Nouvelle-Zélande où le XV de France de Mathieu Bastareaud, capitaine tracassé, va jouer cartes sur table (je sais, elle est facile) pour tenter de remporter au moins un test-match sur les trois au programme du mois. Face aux All Blacks, le mental ne suffira pas. Il faudra, à l'image de Castres devant Montpellier, y mettre des valeurs hormonales en défense et de la précision en attaque. Et inversement. Vous dire aussi, que le «huit qu'on aime», William, est entré dans l'en-but lundi matin après un long combat. Parti heureux, touché par les marques d'affection qui lui ont été envoyé, entouré de ses anciens coéquipiers, dont notre ami et bloggeur Kudekask. Une pensée pour Florence, Marine, Lilou et Elisa, son épouse et ses filles.